Les salariés en arrêt de travail bénéficient, sous réserve de remplir certaines conditions administratives, de revenus de remplacement.
Le versement de ces revenus par le régime d’assurance maladie et, le
cas échéant, par les employeurs ou organismes d’assurance, ouvrent un
droit au contrôle de la part des différents payeurs.
Les règles relatives à ces contrôles ont fait l’objet de modifications récentes, notamment dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2010.
Alors que, jusqu’à présent, les visites de contrôle diligentées par
l’employeur avaient peu d’effets directs sur le versement par la
Sécurité sociale des indemnités journalières, ces évolutions nouvelles
viennent modifier de manière substantielle les règles en la matière.
Dans ce contexte, cette fiche a pour objet de préciser les modalités de contrôles
qui peuvent survenir, d’examiner quelles peuvent en être les
conséquences et d’envisager les voies de recours possibles. Par
ailleurs, le contrôle des congés maladie des agents de la fonction
publique par leur administration relève d’un régime particulier que nous
ne développerons pas ici.
A/ Les modalités de la contre-visite
L’article L.1226-1 du Code du Travail
prévoit que les salariés justifiant d’au moins une année d’ancienneté
au sein de l’entreprise bénéficient d’indemnités complémentaires à
celles versées par l’Assurance maladie. Le bénéfice de
ces indemnités complémentaires entraîne l’obligation pour les salariés
de se soumettre, le cas échéant, à une contre-visite organisée par
l’employeur.
En 1978, la loi relative à la mensualisation et à la procédure conventionnelle
prévoyait qu’un décret en Conseil d’Etat déterminerait les formes et
les conditions de ce contrôle. Malgré la non-parution de ce décret, la
Cour de cassation a estimé, en 1983, que ces dispositions pouvaient
s’appliquer. Les modalités d’application de ce texte relèvent donc de
constructions jurisprudentielles, issues de litiges salariés/employeurs
portés devant les tribunaux.
Par ailleurs, de nombreuses
conventions collectives mettant en place des mécanismes de maintien de
salaires prévoient également la possibilité pour les employeurs
d’organiser des contre-visites.
1/ Qui effectue la contre-visite ?
La contre-expertise
est effectuée par un médecin contrôleur qui, en principe, peut être
désigné par l’employeur. Toutefois, certaines conventions collectives
prévoient des dispositions plus contraignantes en imposant le choix du
médecin parmi la liste des experts près des tribunaux.
2/ Où s’exerce la contre-visite ?
: la communication par l’employeur de son adresse personnelle n’est pas
considérée comme une atteinte à sa vie privée. Sur cette question, la
Cour de cassation a considéré qu’un salarié refusant d’informer son
employeur de son lieu de repos différent de son lieu de résidence
habituel privait celui-ci de ses possibilités d’exercer un contrôle et
pouvait donc donner lieu à la suspension des indemnités complémentaires.
Les modalités de la contre-visite lors d’arrêts maladie
3/ Quand la contre-visite peut-elle s’effectuer ?
La date et les heures de la contre-visite
peuvent être fixées librement par l’employeur. Il n’y a pas
d’obligation de prévenance du salarié. Néanmoins, pour l’effectivité de
son contrôle, l’employeur doit tenir compte des autorisations de sorties
prescrites par le médecin traitant, telles que définies par l’article R.323-11-1 du Code de la Sécurité sociale.
4/ Que peut constater le médecin contrôleur ?
Le médecin contrôleur
se prononce préalablement sur le fait d’avoir pu ou non rencontré le
salarié en arrêt de travail. Pour ce faire, il doit organiser sa visite en dehors des heures de sortie autorisées. Par ailleurs, le salarié peut a posteriori justifier son absence
dans les cas où il a dû s’absenter de son domicile pour suivre un
traitement thérapeutique ou se rendre à une consultation médicale. S’il a
pu examiner le salarié, le médecin contrôleur se prononce sur le caractère justifié ou non de l’arrêt de travail.
B/ Les conséquences de la contre-visite
1/ Les conséquences de la visite vis-à-vis de l’employeur
En
cas d’impossibilité de contrôle ou en cas d’avis concluant au fait que
l’arrêt de travail est injustifié, la seule conséquence que l’employeur
peut tirer est la suspension des indemnités complémentaires qu’il verse.
En
revanche, l’employeur ne peut en aucun cas utiliser les résultats de
cette visite pour sanctionner un salarié d’une quelconque autre manière,
dans le cadre de l’exécution du contrat de travail.
Par ailleurs, la portée de la visite est limitée dans le temps. L’appréciation du médecin de contrôle
ne vaut pas pour la période antérieure à la visite et ne peut donc
remettre en cause les indemnités complémentaires dues par l’employeur
pour la période précédant la contre-visite et/ou déjà perçues par le
salarié.
L’avis du médecin contrôleur est communiqué à l’employeur et au salarié visité. L’article L.315-1 du Code de la Sécurité sociale
prévoit que le médecin contrôleur qui conclut à l’absence de
justification d’un arrêt de travail ou fait état de l’impossibilité de
visiter le salarié doit transmettre son rapport au service du contrôle
médical de la Caisse primaire d’Assurance maladie de l’assuré dans un délai maximum de 48 heures.
2/ Les conséquence de la visite en matière de Sécurité sociale
Avant la récente loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2010, la contre-visite patronale
n’entraînait pas de conséquences directes sur l’indemnisation du
salarié par l’Assurance maladie. En effet, seul un contrôle du service
médical initié par la caisse, suite aux conclusions résultant de la
contre-visite diligentée par l’employeur, pouvait entraîner la
suspension des indemnités journalières.
La procédure prévue dans la nouvelle rédaction de l’article L.315-1 du Code de la Sécurité sociale
est désormais bien différente. En effet, dans l’hypothèse où la
contre-visite patronale conclut à l’absence de justification de l’arrêt
maladie, le service médical de la caisse peut demander au service
administratif de suspendre le versement des indemnités journalières sans procéder préalablement à une visite de contrôle.
L’assuré peut contester cette décision en saisissant sa caisse pour
qu’un examen soit effectué par le service médical de la caisse. Cette
visite doit être organisée dans un délai fixé par un décret non paru à ce jour.
Quand le médecin diligenté par l’employeur n’a pu effectuer la visite, la caisse ne peut en revanche suspendre les indemnités journalières sans faire procéder à une visite par son service médical.
Par ailleurs, le nouvel article L.323-7 du Code de la Sécurité sociale
prévoit qu’à la suite d’une décision de suspension des indemnités
journalières, un nouvel arrêt de travail prescrit par le médecin
traitant, dans un délai défini par décret, ne pourra donner lieu à
indemnisation qu’après avis du service médical de la caisse. A la date
de publication de cette présente fiche, le décret d’application de cette
disposition n’était pas paru.
Lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour l’année 2010, le CISS a
eu l’occasion d’exprimer son opposition quant aux modifications
apportées aux textes en vigueur et a présenté des propositions
d’amendement – malheureusement essentiellement en vain – en vue de
limiter les effets potentiellement dangereux pour les salariés malades.
En effet, la lutte contre la fraude
n’est acceptable que si celle-ci est établie dans des conditions
équitables et que si les décisions prises par les instances présentent
les garanties nécessaires en matière d’impartialité et de respect du
contradictoire.
Or, ce texte porte en lui les germes de la privatisation inacceptable du contrôle de l’assuré social et de l’instrumentalisation par l’employeur de cette procédure vis-à-vis de salariés en position de fragilité.
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